Paul Watson, fondateur de l’association Sea Shepherd, connu pour son combat contre les baleiniers, a été arrêté au Groenland le 21 juillet 2024. Le 15 aout 2024, le Tribunal du Groenland décidait de maintenir Paul Watson en détention jusqu’au 5 septembre 2024.
Pourquoi Paul Watson a-t-il été arrêté ? Quels droits a-t-il violé ? Quel est le traitement des mammifères marins au Danemark et au Japon ?
L’arrestation de Paul Watson
Paul Watson est connu par tous les défenseurs de la cause animale, et même au-delà, pour son combat contre les baleiniers, mais aussi de manière générale pour la défense des animaux marins. Admiré par beaucoup, il représente aussi une « menace » pour des pays dont la chasse à la baleine est une tradition. Entre autres, le Japon, qui continue encore aujourd’hui de consommer de la viande de baleine.
Selon Sea Shepherd France, cette arrestation serait liée à une ancienne « notice rouge » d’Interpol. Il n’avait pourtant depuis jamais été arrêté. Les pays sont en effet libres de procéder ou non à une arrestation provisoire dans l’attente de l’extradition de la personne, de sa remise ou autre mesure similaire. L’arrestation ferait suite à un mandat d’arrêt international émis par le Japon, lors du voyage de M. Watson vers le Kangei Maru, le nouveau baleinier usine du Japon.
Pourquoi un mandat d’arrêt international du Japon ?
Le mandat d’arrêt a été émis par le Japon en raison d’activités contre la chasse à la baleine en Antarctique et notamment en 2010 par Paul Watson et son association Sea Shepherd. Le baleinier japonais Shonan Maru No. 2 s’apprêtait à chasser des baleines lorsqu’un trimaran de Sea Shepherd, l’Ady Gil, est entré en collision avec celui-ci afin de l’empêcher de chasser. Un mois plus tard, le capitaine néozélandais de l’Ady Gil, Pete Bethune, est monté à bord d’un navire japonais afin de procéder à « l’arrestation citoyenne » de son capitaine. Il sera emprisonné cinq mois au Japon, puis condamné à deux ans de prison avec sursis par un tribunal japonais. Depuis, le Japon qualifie les militants Sea Shepherd d’écoterroristes et les tensions persistent.
Quel est le traitement des mammifères marins au Japon et au royaume du Danemark ?
La plupart des mammifères marins font l’objet d’une protection internationale. En 1946 est signée la Convention internationale pour la règlementation de la chasse à la baleine. Visant à réglementer la chasse à la baleine, elle les protège de ce fait indirectement. En 1948 a été créé la Commission Baleinière Internationale (CBI), organe de contrôle de la Convention, dont 88 pays sont membres aujourd’hui.
En 1982, un moratoire à durée indéterminée a été adopté, signifiant l’arrêt de toute prise commerciale. Il sera appliqué en 1986 et est toujours en vigueur aujourd’hui. Les prélèvements sont encore autorisés pour la recherche scientifique.
La chasse à la baleine est donc encore pratiquée aujourd’hui par trois pays : le Japon, la Norvège et l’Islande, alors même qu’ils sont membres de la CBI. Le Japon quittera la CBI en 2018 dans le but de reprendre la chasse commerciale. Le Japon n’a cependant jamais réellement arrêté la chasse commerciale de la baleine. Les prélèvements, déclarés pour la recherche scientifique, n’empêchait pas la vente de la viande de baleine dans les restaurants japonais. Le Japon a été condamné en 2014 par la Cour Internationale de Justice, commercialisant les baleines qu’il prétextait pêcher pour la recherche scientifique.
Le 21 mai 2024, le Japon inaugurait son nouveau baleinier : le Kangei Maru, avec lequel il souhaite capturer 200 cétacés jusqu’à la fin de l’année. C’est vers ce navire que Paul Watson se dirigeait.
Moins connu, le Japon est aussi responsable de la mort de centaines de dauphins chaque année. Tous les ans, dans la baie de Taiji, se déroule une chasse annuelle aux dauphins. Ceux-ci, rassemblés dans une baie où ils ne peuvent s’échapper, sont massacrés au titre de la tradition par l’insertion d’une tige en métal dans la région cervicale, causant d’atroces souffrances. La viande des dauphins est consommée, mais ils peuvent aussi être capturés pour être vendus à des aquariums.
Au Danemark, c’est une autre tradition qui justifie le massacre de dauphins pilotes : le Grindadrap sur les Îles Féroé. Les animaux tués sont des globicéphales noirs, des dauphins à flancs blanc ou des grands dauphins. La chasse servait auparavant à nourrir la population des Îles Féroé. Aujourd’hui, même si une partie de la viande issue de cette chasse est encore consommée, beaucoup de dauphins sont tués sans que leur viande le soit. Une fois coincés dans la baie, les cétacés se heurtent à la berge et les chasseurs commencent les abattages. Tous les individus capturés sont tués, même les jeunes et les femelles gestantes, à l’aide de harpons. Décrite sans souffrance par les féroïens, certains individus se débattent pendant plusieurs minutes avant de réellement mourir. Les morts sont parfois mal faites, obligeant les chasseurs à s’y reprendre. Sans compter les derniers cétacés à être abattus, gisant dans le sang de leurs congénères et qui ont assisté au massacre de toute leur famille. Malheureusement, les conventions internationales signées par le Danemark concernant la protection des animaux ne s’appliquent pas automatiquement aux Îles Féroé, qui dispose d’un statut autonome, de sorte que cette pratique est légale sur ces îles.
Lola JAHAN, Juriste
Graziella DODE, Avocate
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