Dans une affaire rappelant celle jugée par le Tribunal correctionnel de Laon le 21 mars 2025, un circassien a de nouveau été condamné par le Tribunal judiciaire de Lille le 27 mars 2025 pour des manquements graves à la réglementation encadrant la détention d’animaux sauvages dans les établissements itinérants.
Contrôlé à plusieurs reprises sur le territoire, l’exploitant faisait l’objet de poursuites pour deux délits concernant six félins :
- Une exploitation irrégulière de son établissement ;
- Des mauvais traitements à l’égard de ses félins.
- Des conditions de détention contraires à la réglementation
Les infractions constatées reposaient notamment sur le non-respect de plusieurs dispositions de l’arrêté ministériel du 18 mars 2011 fixant les conditions de détention et d’utilisation des animaux vivants d’espèces non domestiques dans les établissements itinérants.
Ce texte vise à garantir le respect des besoins biologiques et comportementaux des animaux, en imposant notamment des exigences minimales d’hébergement, d’enrichissement, d’accès à l’eau ou encore d’entraînement adapté.
En l’espèce, les contrôles réalisées par l’Office Français de la Biodiversité (OFB) ont mis en évidence :
- L’absence d’une cage de détente extérieure ;
- Des surfaces inférieures au seuil légal (parfois seulement 3,5 m² par félin, contre un minimum réglementaire de 7 m²) ;
- L’absence d’équipements fondamentaux (piscine, dispositifs d’enrichissement, abreuvoir permanent).
Les conditions de détention des fauves étaient donc totalement inadaptées.
A titre de comparaison, la surface minimale recommandée pour un grand chien, comme un Saint-Bernard, est de 10 m². Comment concevoir qu’un tigre ou un lion puisse vivre convenablement dans seulement 3,5 m² ? La surface réglementaire de 7 m² semble, elle aussi, bien insuffisante pour garantir leur bien-être …
- Une maltraitance passive caractérisée
Bien que la défense contestait toute intention de nuire, en arguant de l’absence de volonté de faire souffrir les animaux, les juridictions ne sont pas dupes.
Il existe plusieurs formes de maltraitance animale.
La maltraitance passive, par exemple, constitue une infraction autonome. Elle désigne le fait de ne pas fournir aux animaux les conditions de vie minimales nécessaires à leur bien-être, même sans intention de leur nuire (sans élément moral).
C’est précisément l’argument soulevé par les trois associations de protection animale constituées parties civiles : les manquements structurels répétés (espaces insuffisants, absence d’eau ou de stimulation) traduisent une méconnaissance des obligations professionnelles et un traitement indigne des animaux.
- Une décision rugissante
Le parquet avait requis une décision pour le moins étonnante et contestable : la relaxe du chef de maltraitance, tout en sollicitant la confiscation des animaux et des véhicules.
Le tribunal de Lille a pris une décision plus cohérente en reconnaissant le circassien coupable des deux infractions et ordonnant la confiscation de six félins, confiés à un refuge spécialisé.
Bien que l’absence d’amendes soit regrettable, la justice commence à sortir les crocs pour punir les détentions d’animaux sauvages dans des conditions empêchant l’expression de leurs comportements naturels.
Le prévenu a par ailleurs été condamné à indemniser chacune des trois associations à hauteur de 500 euros de dommages et intérêts, ainsi que 1.000 euros pour leurs frais de justice.
Une procédure d’appel est en cours.
Lyslou Gailhaguet
Elève-avocate
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